Pourquoi coudre ?
La couture est une activité qui remonte quasiment à la nuit des temps. Des aiguilles à chas faites à partir d’os et datant du paléolitique (- 45000 ans) ont été retrouvées en Sibérie.
Le muséum de Toulouse expose une jolie collection d’artefact et j’aime particulièrement la mise en parallèle de trousses de couture, l’une datant du paléolitique et l’autre contemporaine. Des milliers d’années les séparent mais l’objectif reste le même confectionner un habit pour soi ou ses proches.
Je ne vais pas raconter l’histoire de la couture et de la confection même si cela pourrait être fort instructif, non, je vais plutôt partager les motivations qui m’ont menées à la couture et celles qui me font continuer.
Peut-être vous retrouverez-vous dedans, certainement que vous avez vos propres motivations aussi.
Nous avons toutes et tous nos propres raisons pour nous mettre à la couture.
Quand j’étais petite
Pour le contexte, ma mère nous a fait pas, à ma sœur et moi, un certain nombre de vêtements quand nous étions petites. Une de ses dernières confections fut un ensemble blaser et pantalon dans un vert très vif pour moi. Je devais avoir 12 ans. Qu’est-ce que j’ai pu le porter !
Puis les engagements professionnels ont pris le dessus et elle n’a plus vraiment refait de vêtements. Maintenant, c’est elle qui me demande de lui en faire.
Mon premier souvenir remonte au collège et aux cours d’EMT. Je ne sais plus précisément la classe mais cette année là, nous avions une professeure qui nous avez enseigné la dactilographie sur machine à écrire et des cours de couture (dans le genre stéréotype genrée on était pas mal car les garçons de la classe n’assistaient pas à ses cours là!)
Donc, la toute première réalisation avec une machine à coudre fut un sac en tissu façon totebag. Un projet basique mais dont j’étais fière et que j’ai utilisé pendant quelques temps.
C’est un peu plus tard, vers 14- 15 ans que je me prise d’un très fort intérêt pour la mode et le vêtement . Adolescente j’achètais le magazine Glamour dont je déchirais les pages de mes tenues préférées pour les afficher sur les murs de ma chambre.
J’avais littéralement adoré un ensemble veste pantalon noir et rose.
La veste avait pour particularité de dégager complétement les épaules, à la manière des robes de bal de la fin XIXème siècle. Un grand revers rose fushia recouvrait le haut des bras et du buste. Les manches et le corps de la veste étaient noir ainsi que le pantalon aux bas de jambe légérement évasés.
Je trouvais ce tailleur tellement beau que j’avais tenté de le faire dans une chute de tissu damas rouge pour une poupée. Autant dire que le résultat n’était pas des plus fantastiques !
A défaut de pouvoir confectionner, faute de matériel et de connaissance (la transmission ne s’est pas faite de mère à fille), je dessinais beaucoup, je m’inventais des défilés. C’est à cette époque que je me suis mise à réver d’une carrière dans le stylisme. Je dis bien ‘à rêver’ car cela a été balayé pour tout un tas de raison.
Je couds, je loupe, je refais
Je me suis un peu éloignée de la couture et du textile pendant un temps. C’est vers la vingtaine que je me suis de nouveau intéressée à la couture et que je m’y suis remise.
Pas du tout dans une optique de créer pour les autres mais de me faire mes propres vêtements car je ne touvais pas ce que je voulais dans les boutiques. Il faut dire aussi que ma mère avait une collection de patrons de couture qui me donnait bien des envies.
Comme j’aime bien les défis, ou disons que j’ai largement sous estimé la difficulté, je me suis lancée dans la confection d’une robe longue, bretelles spaghetti, col bénitier avec un choix de tissu tout à fait adapté pour un début : une mousseline uni pour le fond de robe et une mousseline imprimé pour la robe – obligé de doubler, l’imprimé était transparent ! Entre les galères évidentes à travailler ces matières et une prise de poids, ce projet s’est terminé en jupe de plage façon porte-feuille !
Le poids, voilà un autre motif pour me lancer dans la couture. Une morphologie qui ne trouve pas de chose adaptée en boutique, soit trop serré aux hanches et trop large à la taille ou la poitrine comprimée dans des chemisiers malgré une largeur d’épaule correcte.
Obligée de porter le style sac quand on aime les vêtements plus stylés et ajustés ne va qu’un temps.
Liberté et autonomie
Un ras le bol de ne pas m’habiller comme je le veux a fait que coudre pour moi devenait une évidence. A force de pratiquer, j’ai commencé à modifier et altérer les patrons pour les adapter à ma morphologie.
La plupart des patrons que l’on trouve sont fait pour des statures de 1m68 en bonnet B. Etant plus petite de taille et plus généreuse de poitrine, j’ai vite dû reprendre les patrons et là, cela devient très intéressant car le résultat est vraiment satisfaisant – enfin tant que l’on ne prend pas trop de poids !
Actuellement, je vais devoir me refaire toute une garde robe à cause de cela. J’ai tenté le ‘je ne me refais pas de vêtement tant que je n’ai pas perdu mes kilos‘ et devinez quoi, ça ne marche absolument pas !
Pour ce qui est des tissus, j’en ai tout un stock et là j’aborde un autre aspect : le financier.
Histoire de sous
J’entends assez souvent que cela coûte moins cher de se faire ses propres tenues.
Moins cher par rapport à quoi, à qui ?
La couture demande un certain investissement en matériel – machine à coudre, surjeteuse, recouvreuse, fer à repasser, table à repasser et tout le petit matériel indispensable – ainsi qu’en matières premières – tissus, fils, boutons, fermetures à glissière, ruban, passepoil, entoilage…, sans compter l’électricité consommée pour faire fonctionner les différents appareils.
Il faut aussi beaucoup rater avant de sortir des pièces qui ne fassent pas ‘fabrication à la main’ et répondent à nos exigences.
Si l’on compare avec les produits de la fast-fashion, faire ses vêtements n’est pas du tout intéressant. Mais cela signifie que l’on ferme les yeux sur les conditions de travail des ouvriers de ce secteur, sur la qualité des matières, de la coupe, de la fabrication sans compter l’énorme impact environnemental de cette industrie et les risques pour la santé à porter des vêtements aux matières pas toujours respectueuses des normes. La fabrication des tissus, leur stockage utilisent des produits chimiques qui sont normalement réglementés. Quand cela n’est pas le cas des résidus chimiques persistent sur le produit final et peut causer des problèmes de peau, des allergies aux conséquences plus ou moins graves. D’où la nécessité de toujours laver un vêtement avant de la porter.
Pour avoir travaillé dans une usine de confection, j’ai pu constaté une certaine abération écologique dans la gestion de la fabriction de certaines pièces. Plusieurs entreprises interviennent pour la conception, la fabrication d’un vêtement. Chacune a sa spécialité et elles ne se situent pas toutes au même endroit, loin de là.
Notamment, je me souviens d’un article en particulier où le contrôle qualité était réalisé par le client lui même avant de repartir pour le flocage. Pour le contrôle, toute la marchandise devait lui être livrée à l’étranger avant d’être expédiée vers l’entreprise qui allait réaliser l’ornementation de chaque pièce. Le produit n’est pas fini qu’il a déjà parcouru plusieurs milliers de kilomètres.
En général, quand on fait ses propres vêtements, une fois que l’on a acquis les matières, le reste est fait en un seul endroit. Je pense que l’on est aussi plus précautionneux avec ce qui nous a demandé du temps et de l’effort. En cas d’accident, on peut facilement le réparer. La qualité des coutures, des matières utilisées va aussi nous permettre de faire durer beaucoup plus longtemps le vêtement.
Je compare ce que je fabrique avec des marques plutôt haut de gamme dans la mesure où on peut espèrer un meilleur bien-aller, des coupes plus travaillées, des finitions de qualité et une meilleure durabilité du produit.
Dans ce cas, oui, c’est moins cher de faire soi-même car je n’aurais pas les moyens de m’habiller dans ces boutiques.
Mais surtout ce qui me motive à faire mes vêtements, c’est le plaisir de fabriquer quelque chose de mes mains, de partir d’un coupon de tissu, d’en faire plein de petits morceaux et de les assembler pour aboutir à une seule pièce. A partir d’un même patron, les déclinaisons sont innombrales et on peut refaire sans que ce soit toujours la même chose.
La technicité, les difficultés rencontrées et les solutions à trouver font parti de ce plaisir.
Savoir que personne n’aura tout à fait le même chemisier, la même robe, le même manteau est aussi très agréable.
Maintenant, il faut du temps et de l’espace pour s’adonner à cette passion. Je crois qu’une fois que l’on a mis le doigt dedans et pour peu que l’on apprécie, il est très difficile de s’arrêter. Quand nos proches commencent à nous demander de leur faire un vêtement, je pense que l’on peut se dire que nous commençons à avoir un niveau intéressant et moi cela me donne encore plus envie de progresser !
Alors, à nos machines !